Légion d’honneur

Légion d’honneur

Quelqu’un de très discret a proposé mon nom pour cette incroyable distinction : la remise de la légion d’honneur, selon lui il est important qu’une personne du « terrain soit aussi épinglée”. 

Marie-Paule Blanchard & Sophie Cluzel  (secrétaire d’État chargée des Personnes handicapées de 2017 à 2022)

Le 14 janvier 2021 je recevais le courrier officiel de ma nomination de chevalier de la Légion d’honneur. Les premiers mots de la lettre m’interpellent : “Cette reconnaissance de la nation vient récompenser…etc.”. Ce mot “nation” est si fort, je me sens en complet décalage, cette question de nation notion va me poursuivre longtemps ! 

Le 31 août Sophie Cluzel Secrétaire d’Etat aux personnes handicapées me décorait. 

C’est le côté pionnier, tant dans le domaine des inclusions scolaires et professionnelles, ainsi que nos excellents résultats de maintien dans l’emploi, qui ont probablement justifié cette haute distinction.  

Si dans l’histoire chronologique, je reconnais ma participation dans les avancées de ces : “possibles” d’étudier et de travailler parmi tous, il m’apparait évident que c’est la pratique des métiers enseignant et technicien de l’intégration, qui a produit ce que nous avons célébré

AVEC cofondée avec François Zittoun est une belle histoire ! Espace axé sur le droit, espace ouvert sur l’entreprise, espace d’intuitions et de réflexions sur les effets de ces présences “singulières”, espace de création à partir de ce qui manque pour que les personnes vulnérables puissent trouver une juste place parmi tous. 

Après toutes ces années, je perçois le “pouvoir” des vulnérabilités.  

“Vulnérabilité” ce nom commun si courant mais vague, devient très concret dans chacune des situations en entreprises ! Une vulnérabilité c’est comme un “grain de sable” qui bloquerait un rouage dans l’exécution d’une tâche, d’une organisation, d’une relation…la nature de ces grains de sable : des troubles de mémoires, de raisonnements logiques, d’attentions, de coordinations neuro-musculaires, d’humeur, de compréhensions, d’agitations, des TOC etc. certes ces fragilités sont connues par tout un chacun, mais chez les personnes que nous accompagnons elles deviennent obstacles pénalisants. 

Le salarié accompagné s’engage dans le service à tenir avec responsabilité sa fiche de poste adaptée. Il s’engage aussi avec l’association à essayer de dépasser ses freins, il se sait capable et responsable. 

Ce qui est attendu en entreprise, c’est “le faire” des tâches indispensables au service. Le manager, les consultants d’AVEC talents avec ce salarié, sommes tous concernés par ce qui est difficile dans ce “faire”. Analyser, écouter, imaginer : “comment faire /comment dire autrement ? » Comment trouver un outil, une consigne “vibratoire”, un dessin, un enregistrement audio… qui deviendraient des leviers permettant pour dépasser les freins ciblés ? 

Le mot vulnérabilité, AVEC le voit comme un capteur de questions : “comment faire pour ne pas en rester là ?”. AVEC le voit comme un collecteur, un appel d’air inédit pour la recherche d’outils compensatoires non standards.  

Après toutes ces années, nous cherchons à comprendre l’origine de cet obstacle qui bloque la réalisation des tâches (le balayage d’un escalier, le regard d’un responsable au-dessus de l’épaule, la fatigue, le bruit etc.). L’obstacle peut également surgir dans l’organisationnel, le relationnel, la mémoire. Autour du bénéficiaire d’AVEC, son manager, ses collègues les consultants d’AVEC talents nous osons proposer des éclairages, choisir ce qui semble être le plus pertinent et le mettre un en pratique.  

La méthode d’AVEC talents n’est pas un kit de recettes à appliquer avec un ordre de progression établie. 

Se sentir concerné par un obstacle qui “bloque” un rouage dans “le faire”, c’est découvrir un geyser d’énergies qui persiste après le résultat obtenu entre ceux qui cherchent une solution. Cette démarche collective, c’est le “goût des autres”, le goût du travail bien fait et qui a du sens, c’est croire dans la capacité des personnes que nous accompagnons, c’est du soin. Ce sont aussi des trouvailles. C’est aussi s’étonner de partager les bénéfices collatéraux. 

Le handicap n’attire pas. Les projecteurs de la mode ou des peoples nous ont été épargnés. Notre travail n’a pas été troublé par le factice. 

Nous salariés d’AVEC talents, nous nous étonnons de nos propres développements. Notre œil, notre écoute, s’affinent. Beaucoup d’entreprises profitent d’évolutions liées à la présence de ce collaborateur “différent”.  

Les bénéficiaires sont fiers de leur statut de salarié. Leurs responsabilités assumées dans l’exécution des tâches, dans le relationnel, cette perception plus confiante de soi rejaillit dans leur vie hors entreprise. Le travail est souvent thérapeutique.  

Les architectes et les artisans du domaine immatériel d’AVEC talents doivent continuer à l’inventer. Nous appartenons à ce peuple pluriel concerné par l’économie, la santé, l’éveil intellectuel, la juste place dans la société. Notre association simple, vivante m’étonne, je fais partie de ce peuple qui sans se le dire, communique à partir des langues des bénéficiaires. Ces attitudes non théorisées, passent au-dessus des divergences de croyances, de milieux sociaux … Ce peuple de bizarres, de génies, associe ses énergies, ses compétences, produit des “luxes” dont nous sommes actionnaires. Les compétences, les énergies circulaires et globales des développements, chaque acteur les alimente et en bénéficie   

Tout compte fait, ne serions-nous pas “la nation” qui reçoit la médaille de la Légion d’honneur n’est-ce pas François ?